Ce document a été distribué aux membres du COPIL physiquement présents à la première réunion du Comité de pilotage.
Objet : Projet « La restauration de la continuité écologique de la Vée, le désenvasement pérenne du Lac et l’aménagement paysager de Bagnoles de l’Orne Normandie »
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Madame, Monsieur,
L’Association Les Amis de Bagnoles de l’Orne Normandie tient à remercier les organisateurs de ce COPIL, cette invitation est une marque de reconnaissance du rôle fondamental que nous souhaitons jouer dans la préservation de l’intérêt général, au croisement du patrimoine naturel, culturel et historique et souhaite rappeler, dès l’ouverture de cette instance, les principes qui guident sa participation :
– Nous sommes ici pour rappeler que les choix futurs devraient respecter la réalité géomorphologique, historique et écologique du site, et confirmer les liens existants entre le lac et les éléments bâtis patrimoniaux alentours (casino, villas Belle Époque, parc thermal).
- Nous nous engageons à informer le public, à documenter le processus spécifique de ce projet, et à faire valoir les pré requis fondamentaux pour appréhender en toute transparence cette proposition.
Le lac de Bagnoles : un plan d’eau d’origine naturelle, devant une cluse rocheuse
Il est essentiel de rappeler que le plan d’eau actuel ne résulte pas d’un aménagement artificiel moderne, mais qu’il se situe naturellement en amont d’une barrière rocheuse à l’entrée de l’ensemble géologique des failles varisques de
la cluse de la Vée. Nous attendons à ce sujet une démonstration contraire documentée qui prouverait le caractère anthropique de la retenue d’eau.
Cette morphologie géologique singulière a favorisé la formation d’un plan d’eau dès l’époque ancienne.
La forge implantée au XVIIe siècle n’a pas créé le lac, mais a simplement exploité un site existant, déjà favorable à l’accumulation d’eau.
Les cartes géologiques et les études topographiques confirment la présence historique d’un élargissement naturel du cours d’eau à cet endroit.
Une écologie spécifique à préserver, non à normaliser
Cette configuration naturelle a permis le développement d’une écologie singulière.
Les espèces aquatiques vivant en amont du seuil rocheux bénéficient d’un répit biologique, à l’abri de certains prédateurs présents en aval. Il pourrait exister ici des niches écologiques uniques, voire des équilibres évolutifs locaux qu’une “restauration” mal calibrée viendrait perturber.
- Il est donc crucial de ne pas plaquer mécaniquement un schéma de continuité écologique standardisé, basé sur des modèles fluviaux non adaptés au site ;
- Réfléchir à la spécificité des habitats déjà présents, qui ne sont pas des anomalies, mais des richesses ;
- Préférer une gestion raisonnée du site, respectueuse de sa structure géologique et de son identité patrimoniale.
Un désenvasement pérenne est illusoire dans les conditions actuelles
Le lac, comme tout plan d’eau naturel traversé par un cours d’eau, est par nature soumis à l’envasement. Aucun dispositif de curage ou de “désenvasement pérenne” ne peut être durable sans altérer la configuration même du site, ni être compatible avec une gestion écologique sobre et respectueuse du lieu.
L’objectif ne doit donc pas être un désenvasement « permanent » – notion contraire aux dynamiques naturelles – mais une gestion adaptée et ponctuelle, en accord avec le rythme de la nature.
Un détournement et une accélération du cours de la Vée
Ces interventions présentent un caractère lourd et potentiellement risqué pour l’environnement sensible de la source thermale.Elles se situent dans le périmètre de protection de cette ressource naturelle, essentielle à l’activité de la station thermale et à plusieurs acteurs économiques majeurs, tels que le casino JOA.
Par ailleurs, le projet envisagé pourrait accroître les risques de pollution en cas de débordement ou de dysfonctionnement hydraulique. Il va également à l’encontre des prescriptions actuelles du Plan de Prévention des Risques d’Inondation (PPRI), dont l’objectif est précisément de protéger les installations thermales et un site classé SEVESO situé à Couterne.
Effets négatifs de la suppression de la retenue d’eau:
1 .Reprise importante de l’érosion régressive
2 .Réactivation de l’érosion latérale en amont, le long des berges de l’ancien plan d’eau ainsi que dans l’emprise de l’érosion régressive du remous solide
3 .Sur-alluvionnement en aval et ses effets hydromorphologiques et écologiques
4 .Affaissement de la nappe d’accompagnement en amont
5 .Remise en cause de l’équilibre écologique mis en place en amont depuis l’installation du barrage
6. Médiocre qualité d’habitat sur les cours d’eau ayant subi une chenalisation.
7 .Mortalité d’une partie de la ripisylve dont les racines seront exondées
8 .Réduction du volume de zones refuges pour les poissons en étiage sévère
9 .Déformations géotechniques des bâtiments situés le long de l’ancienne retenue
10 .Modification des peuplements biologiques
11 .Modification des processus physico-chimiques
12 .Plus d’effet tampons du Lac sur les inondations
13 .Plus de soutien à l’étiage si le barrage est retiré
Le rôle de l’association dans ce processus
Face à la complexité de ce dossier, notre association se donne pour missions :
• D’informer objectivement le public, sans simplification ni dramatisation ;
• D’identifier les processus et les concepts en oeuvres dans le développement du projet ;
• De s’assurer que les conditions d’un consentement éclairé soient réunies avant toute décision technique ou politique.
. Conclusion
Un projet responsable ne peut effacer les spécificités d’un site au nom de principes abstraits.
Il doit partir du site tel qu’il est, avec son passé géologique, sa mémoire historique, son écologie propre, et non d’un modèle figé à appliquer.
⚠️ Reproduire un modèle standard de restauration fluviale sans prendre en compte la morphologie particulière du site peut provoquer une perte irréversible de son identité écologique et patrimoniale.
Nous appelons à une procédure transparente, documentée, participative, dans laquelle le patrimoine naturel et humain de Bagnoles sera véritablement pris en compte.
Fait à Bagnoles de l’Orne le 06 juin 2025
Gérard Bedouet, Président de l’association LABON